mercredi 4 avril 2007

Le Noël de René et Toto








Il a neigé toute la nuit.
Tout est blanc.
Tout dort dans la forêt de Chantelouve.













Tout ? Non, pas tout à fait, car au loin, près du grand chêne, on entend de grands cris impatients
« René ! René ! Viens vite ! »
... et on entend aussi des grognements endormis :
« Mmm… Mmmm… »
- René ! Dépêche-toi !
René s’étire, bâille, se gratte la tête et demande :
- Mmmm… Quoi ? Que se passe-t-il ?
- Viens voir : c’est bientôt Noël.











René n’y croit pas beaucoup, mais il se lève tout de même.
Tu es sûr ? demande-t-il.
Oui, suis moi, tu vas voir toi-même.
Alors les deux amis quittent le gros chêne et s’enfoncent dans la forêt.
Ils marchent longtemps. René a froid aux pattes. Il a aussi un petit peu faim.Toto n’a pas froid : il est trop excité.









Soudain, Toto hurle : « Là, regarde !!! »
René aperçoit en effet de grands trous bien alignés dans la neige. - Qu’est-ce que c’est ? demande-t-il.
- Ce sont les trous laissés par les sapins qui ont été déterrés pour Noël.
René remarque aussi des traces de roues et des traces de fer à cheval.
- Et là, qu’est-ce que c’est ?
- Ce sont les traces de la carriole du facteur : elles sont très profondes car les sacs sont chargés de lettres pour le Père Noël.
- Alors tu as raison : c’est bientôt Noël.







René et Toto s’assoient tous les deux sur une vieille souche.
- Tu sais, dit Toto, Noël m’a toujours fait rêver…
- Je sais, répond gentiment René, mais tu sais bien que Noël, ce n’est pas pour les animaux.
- Et pourquoi pas ? insiste Toto. J’aimerais tant recevoir un cadeau.
- Moi aussi, mais ce n’est qu’un rêve.
… Les deux amis restent silencieux sur leur vielle souche.









Après de longues minutes, René s’exclame joyeusement : « J’ai peut-être une idée ! »
- Dis vite, dis vite, s’impatiente aussitôt Toto.
- Eh, bien voilà : on pourrait écrire une lettre au Père Noël.- On ira à la ville déposer notre lettre à la poste.A ces mots, Toto saute de joie et se précipite vers la forêt en chantonnant.










Il réapparaît chargé d’une grosse bûche et de petit bois., puis, avec René, il prépare un grand feu.

Les deux amis mangent des châtaignes grillées (surtout René qui avait vraiment très faim et qui est un peu gourmand).
Ils écrivent ensuite leur lettre sur des écorces avec des morceaux de charbon de bois bien pointus.
















Toto a bien ficelé les lettres sur un petit traîneau.
René, qui ressent souvent un petit creux à l’estomac, a ajouté quelques provisions : des châtaignes, des noix,
des pommes et des champignons séchés.

… Et c’est le grand départ !












René et Toto suivent les traces dans la neige et quittent ainsi la forêt de Chantelouve.
Ils parcourent de longues plaines, traversent des rivières, passent des gués…

Ils découvrent des collines, puis des montagnes, puis de nouveau des plaines…
Un matin, René et Toto se réveillent, prêts à reprendre leur longue marche, mais…
Hélas ! La neige a disparu, et avec elle les traces du facteur…







Toto pleure discrètement.
René reste silencieux et se demande tristement :
« Que faire ? Mais que faire ? »



Le soleil est déjà haut dans le ciel quand soudain une grosse voix avec un drôle d’accent interpelle les deux amis :
« Yogolou, caribou, yanoglou ! Bonjour à vous ! Yogolou, caribou, yanoglou ! Mais ici donc, que faites-vous ? »

Toto a très peur de cet énorme animal aux babines baveuses et poilues.
René avance prudemment et répond d’une toute petite voix :
« Nous allons à la ville poster des lettres au Père Noël, mais la neige a disparu et nous avons perdu les traces qui nous menaient à la ville … Et maintenant, nous sommes perdus. »









« Yogolou, caribou, yanoglou, pauvres de vous… Noël est passé, vous n’y êtes plus du tout ! » répond le grand cornu.
« Oh ! s’écrie René… et la ville, c’est par où ? »
« Ici, Yogolou, caribou, yanoglou, il n’y a pas de ville du tout. Allez plutôt chez le Père Noël, il parait, Yogolou, caribou, yanoglou, qu’il habite tout là-haut, au Nord de tout.
Suivez les traces des lutins, ce sont des marques blanches. Si vous savez les reconnaître, elles vous indiqueront peut-être le chemin…
Yogolou, caribou, yanoglou ! Bonne chance à vous ! »
… et l’animal bizarre disparaît tout à coup.








René et Toto regardent autour d’eux et, effectivement, ils remarquent des petites traces d’un blanc éblouissant qui parsèment les branchages, les troncs, et même le sol.
Courageusement, les deux amis suivent ces nouveaux signes et se dirigent ainsi lentement, mais très certainement, vers le Nord.








Après de longues semaines de marche, René et Toto débouchent sur une immense vallée. Il en vient un vacarme assourdissant : des grincements, des coups, des cris, des chants…


Ce sont les bruits de scies, haches et grosses machines autour desquelles s’affairent des dizaines de petits personnages barbus, ventrus, poilus et tous coiffés d’un bonnet de meunier.
- Regarde ! Les lutins du Père Noël ! s’exclame Toto.
- Chut ! Cet endroit est sûrement secret, chuchote René. Allons chercher à qui déposer nos lettres et repartons vite.
Toto suit René qui a repéré un bâtiment entièrement recouvert de mousse.






Les deux curieux se pressent le visage sur la vitre et découvrent ainsi avec émerveillement toute une réserve de boîtes, de pots et de poupées de bois, tous joliment peints de couleurs bariolées.










René et Toto font le tour de la grande maison de mousse et découvrent une petite porte par laquelle ils passent la tête. Ils tendent le cou et découvrent un petit bonhomme barbu qui s’applique à peindre une petite figurine.
Ils s’écrient en même temps :
« Oh ! Que c’est beau ! Quelle belle matriochka ! »

Ils restent longtemps admirer le travail du peintre.

« Monsieur le Lutin ! Monsieur le Lutin ! » appelle Toto au bout d’un moment. Mais le petit personnage ne semble pas entendre.




« S’il vous plaît, Monsieur le Lutin insiste René, pourriez vous nous donner un renseignement ? »
À ces mots l’artiste lève la tête, soulève les sourcils et observe les deux visiteurs de ses yeux étonnés . Il pose son pinceau, sourit et attend. Enhardi, René continue :
« Nous souhaitons, donner ces lettres au Père Noël, savez-vous à qui nous devons nous adresser ? »
Le peintre tend la main, prend les lettres, les glisse dans sa grande poche et se remet aussitôt au travail, sans une parole et sans un regard supplémentaire pour les deux amis.



Pendant ce temps le petit bonhomme, a chaussé son monocle, a déroulé les messages mais… que lit-il ? Rien ! Il n’y a strictement plus rien sur ces rouleaux d’écorce, sinon quelques traces de suie, quelques coulures de sève, quelques auréoles d’humidité...

… Le long voyage a effacé toutes les écritures...












Heureux d’avoir laissé leur message dans de bonnes mains, les deux amis ont repris joyeusement, le chemin du retour à travers la grande forêt de bouleaux.
Les semaines passent. L’automne est déjà bien avancé. René et Toto filent aussi vite qu’ils le peuvent, car ils ne veulent pas rater Noël une fois de plus.

Un jour, enfin, ils pénètrent dans un dernier village, juste à l’orée de la forêt de Chantelouve. La neige commence à tomber.





Et là, quelle surprise ! Guirlandes et sapins décorent les ruelles, les boutiques et les maisons. On entend même les chants de Noël à travers les portes de l’église et les bruits de couteaux, fourchettes et bouchons de bouteilles à travers les volets clos…
« C’est déjà le soir de Noël ! » s’écrie Toto.
« Vite, vite, rentrons à la maison ! » hurle René.











Et c’est en courant, soufflant et suant que les deux voyageurs traversent la forêt de Chantelouve jusqu’au grand chêne, où, épuisés mais heureux, ils se jettent dans le grand lit de René.
Ils sombrent aussitôt dans un profond sommeil empli de rêves et de paysages tous plus étranges les uns que les autres...











Au petit matin, les premiers rayons de soleil illuminent le tapis de neige. Éblouis, René et Toto ouvrent un œil, puis l‘autre, puis se souviennent que c’est le matin de Noël. Alors ils se mettent fébrilement à la recherche de cadeaux : devant la cheminée, au pied du lit, dans les coffres, sous les bancs… ils fouillent dans tous les recoins, mais ne trouvent pas le moindre cadeau !

René et Toto sortent ensemble sur le pas de la porte mais ne voient aucune trace de traîneau, de rennes ni de bottes. Il faut se rendre à l’évidence : une fois de plus, le Père Noël n’est pas passé.

Une larme coule sur la joue de Toto.

René pousse un long soupir.

Pour se changer les idées, René et Toto partent rendre visite à leurs amis de la forêt.
- Au fait, demande René tout en marchant, qu’est-ce que tu avais demandé pour Noël ?
-Moi, je souhaitais un livre sur les régions du Nord que j’avais toujours voulu connaître. Et toi ?
- J’avais demandé d’avoir la chance de faire un jour un grand voyage...




Soudain, de grands cris parviennent de la clairière :
« René et Toto, quelle surprise ! Quelle joie ! Vous voilà de retour!» hurlent joyeusement les animaux de la forêt.

Les animaux décident alors de faire une grande fête.


















Pendant trois jours et trois nuits la forêt résonne des chants, des concerts, des embrassades et des cris de joie des animaux qui se souhaitaient un

Joyeux Noël !